Faire connaître la Louisiane et les Catalognes : Lieux, histoire et événements.
Elisabeth Eidenbenz est décédée hier à l'âge de nonante huit ans. Volontaire du Secours suisse aux enfants, arrivée en France avec la Retirada, elle crée une maternité qui sauvera de nombreux enfants des horreurs de la guerre.
Le 23 décembre 1938, Franco déclenche une offensive pour envahir la Catalogne et percer les lignes républicaines. Au bout de dix jours, ses divisions font éclater l'ensemble du front et se rapprochent de Barcelone qui tombe presque sans combats à la fin de janvier 1939. Les armées franquistes remontent alors vers la frontière, poussant devant eux un demi-million de réfugiés et toutes les autorités républicaines qui sont autorisés à entrer en France à partir du 28 janvier. Des camps sont ouverts à la hâte pour les accueillir, notamment sur la côte : Argelès, Saint-Cyprien, Rivesaltes...
Arrivée en Roussillon avec la Retirada, Elisabeth Eidenbenz, jeune infirmière de la Croix rouge suisse, recueille au château d'En Bardou à Elne (Pyrénées-Orientales), avec le soutien matériel d'associations humanitaires suisses, françaises et américaines, des mamans pour leur très grande majorité internées dans les camps et sur le point d'accoucher. Six cents enfants y sont nés et ont survécu à l'écart des camps sordides d'Argelès, de Rivesaltes, du Barcarès, de Saint-Cyprien, jusqu'à la fermeture du lieu par les Allemands en avril 1944. Tous étaient enfants de réfugiés, Espagnols, Juifs, Tsiganes. Mais pour Elisabeth Eidenbenz, tous ces bébés et leurs mamans appartenaient à une même communauté humaine.
En 2007, la journaliste et romancière Hélène Legrais a consacré un roman (*) sur celle qui avait créé la maternité d'Elne en 1939, alors qu'un demi-million de réfugiés espagnols fuyaient l'avancée des troupes franquistes. Guy Eckstein, né à la maternité le 10 octobre 1941, a préfacé ce livre par ces mots : "Bien qu'elle n'ait au départ aucune connaissance spécifique en obstétrique et en pédiatrie, elle va, sans désemparer, bénévolement, et pour le plus grand bonheur de ses pensionnaires, remplir son rôle de directrice de la fin 1939 jusqu'en avril 1944.
Au milieu des privations et de la barbarie, la maternité suisse d'Elne devient alors, grâce au dévouement et au courage lucide d'Elisabeth, un îlot de paix certes relative, mais à tout le moins un lieu de don et de générosité."
La maternité d'Elne est créée sous l'égide du Secours suisse aux enfants victimes de la guerre et va recueillir pendant cinq ans des femmes sur le point d'être mères.
Hélène Legrais nous dit, à la fin de son livre, ce qu'est devenue cet établissement bienfaiteur : "Le château d'En Bardou, où était installée la maternité suisse, a été rachetée le 1er juillet 2005 par la ville d'Elne, grâce notamment à une grande souscription populaire.
Le but est de poursuivre l'oeuvre d'Elisabeth Eidenbenz en y créant une 'auberge humanitaire' pour accueillir des femmes et des enfants victimes des divers conflits qui ensanglantent notre planète."
Elisabeth Eidenbenz est décédée hier mais son oeuvre continue de sauver des vies...
(*)Le livre d'Hélène Legrais, "Les enfants d'Elisabeth" a paru aux Presses de la Cité.