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10 octobre 2012 3 10 /10 /octobre /2012 09:04

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Après que j'eusse participé à la seule et unique émission littéraire de l'histoire de ma vie de romancier, j'ai souvent été invité à de nombreuses signatures en divers points sur la carte de France. Mes pérégrinations me conduisirent un jour d'octobre jusqu'à un petit village fortifié au coeur des Pyrénées-Orientales. La mairie nous avait, dans sa grande bonté, parqué dans une salle exiguë où nous dûmes, nous les auteurs, nous serrer pour pouvoir tous y prendre place. Le hasard, ou une heureuse initiative de l'administration locale, m'avait réservé un siège à côté de Julien Verjoul, auteur de plusieurs ouvrages sur des personnalités qui avaient séjourné dans le Roussillon. Sur ma gauche, avait pris place une certaine Mirabelle Saintonge qui venait de publier un roman sur sa vie d'ex-fumeuse invétérée et sur ses histoires d'amour, fumeuses elles aussi. Je paraissais minuscule avec mes deux romans ( Ah ! si je n'avais pas tant écrit pour Jacky, j'aurais pu me targuer de publications plus nombreuses) car Verjoul étalait sur le demi mètre carré qui lui avait été alloué une bonne quinzaine d'ouvrages et Saintonge, plusieurs livres pour enfants et trois romans. De toute façon, comme il n'y eut pas grand monde pour venir nous voir, les touristes, enrobés dans leurs ponchos et leurs coupe-vent, tant le temps était maussade et frsiquet, ne firent qu'un aller rapide entre les autocars garés sur le parking hors les murs et le restaurant du village dont je n'eus pas le plaisir de goûter les spécialités. Un pauvre sandwich fut mon seul déjeuner car nous ne pouvions pas quitter la salle, pardon le Salon, au cas où un lecteur se serait sur un coup de tête intéressé à nos oeuvres et se serait présenté devant nous pour une dédicace. Verjoul, pour occuper un temps interminable et monotone, bien qu'un des participants dont j'ai oublié le nom essayait de détendre l'atmosphère en imitant des politiciens et des chanteurs d'une autre époque, allait souvent discuter avec cette Saintonge qui m'énervait avec son accent de nulle part et son vocabulaire suranné. Je rêvais d'endroits plus agréables et peut-être aussi à une idée de départ pour le prochain livre de Jacky, quand Verjoul revint s'asssoir à sa place et me demanda si j'acceptais de l'accompagner le lendemain pour une randonnée jusqu'au massif des Madres. J'avais tant envie de quitter cette salle qui sentait l'humidité et ce village d'où, de toute façon, je sortirais aussi inconnu qu'avant d'y être entré, que j'acceptai immédiatement sa proposition. Je souhaitais, sans en parler à Verjoul, que le temps soit plus clément qu'en ce jour et que cette Saintonge, qu'il regardait avec des yeux gourmands et admiratifs, ne fut pas de la partie, sa jupe plus que courte l'aurait certainement contrainte à ne pouvoir pas faire plus de dix pas sur le sentier abrupt qui s'ouvrirait devant nous.

 

Le lendemain matin, Verjoul m'attendait devant mon hôtel à Perpignan. Il était accompagné d'un écrivain qui n'était pas avec nous la veille, mais que j'avais rencontré en une autre occasion et qui répondait au nom très catalan de Jordi Parayre. Ce dernier ne cachait ni son admiration pour sa région, ni son dégoût pour le centralisme jacobin, et il n'était jamais allé plus loin que l'Agly, rivière qui marquait, selon lui, la frontière entre la Catalogne et la France. Dans le 4x4 de Verjoul, nous suivîmes d'abord la route départementale jusqu'à Prades, puis nous nous engageâmes sur une route sinueuse jusqu'à Mosset. Avant d'arriver dans ce village perché et entouré de sommets boisés dont les pentes faisaient déjà apparaître les belles couleurs de l'automne, je crus voir de loin un chat au milieu de la chaussée. "Un renard !" s'exclama Jordi. Verjoul fit ralentir le 4x4 pour nous permettre de l'approcher. Il n'était pas farouche dans sa belle robe blanche et rousse et eût pu  facilement être apprivoisé. Il nous permit de le photographier aisément avant de passer son chemin. Quelques kilomètres plus loin, Verjoul, que j'appelais déjà Julien, gara son véhicule sous le panneau qui indiquait "Col de Jau, 1 506 mètres". Une rude promenade nous attendait. Jordi nous quitta assez vite, préférant ramasser des champignons à nous suivre dans le sentier qui n'était plus que pierres et cailloux. Julien me précédait, enfin je le laissais me précéder, n'ayant pas l'haitude de repérer sur les arbres les précieuses indications qui dirigent et empêchent les promeneurs de s'égarer voire de se perdre. Julien marchait vite. Il avait l'habitude des randonnées difficiles sur les chemins escarpés. Il avait l'oeil aussi. Il trouva à mon grand étonnement des champignons, des cèpes je crois, sous un rocher devant lequel je serais passé sans en soupçonner la richesse culinaire. Julien parlait peu ; moi, pas du tout, préférant garder mon souffle jusqu'au refuge de la Balette et l'atteindre sans avoir l'air fatigué. Pourquoi Verjoul m'avait proposé cette promenade, dans cet endroit certes magnifique, alors que nous ne nous connaissions que depuis vingt-quatre heures, et sans me demander si j'avais l'habitude des marches de plus de six heures avec cent mètres de dénivelé ? La veille, j'avais feuilleté son dernier roman. Cherchait-il à oublier une histoire privée malheureuse ou voulait-il tester les capacités d'un citadin inadapté à gravir autre chose que la Butte Montmarte ? Nous avions emporté une maigre collation. Le temps ensoleillé et relativement chaud, bien que nous nous trouvions à deux mille mètres d'altitude, nous permit de manger à l'extérieur. Verjoul inspecta cependant le refuge et y trouva une bouteille d'une boisson anisée. Il eut ainsi son apéritif offert par dame providence. Après le repas, nous redescendîmes pour rejoindre Jordi qui ne s'était pas ennuyé, loin de là, et qui avait trouvé suffisamment de champignons pour agrémenter plusieurs omelettes. Le soir, à la tombée de la nuit, Julien nous proposa de dîner dans le jardin de sa maison près de Perpignan et nous nous quittâmes vers minuit. Eux ont poursuivi leur carrière d'écrivain. En ce qui me concerne, je devais terminer le roman que j'avais entrepris pour Jacky et qui devait sortir - l'éditeur de Jacky l'avait ainsi exigé -, pour la prochaine rentrée littéraire. Je ne revis plus ni Julien ni Jordi mais je sais qu'ils sortent un voire deux romans par an.

 

 

 

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